vendredi 6 juin 2014

Sur l'enfer

Qui a encore peur aujourd'hui de l'enfer?
Parler des fins dernières, c'est aussi parler de l'enfer. Ce que nous sommes, le temps d'une seule vie, ce que nous faison, dans sa dimension éternelle, implique une justice à dimension éternelle.
Une des façons de se débarasser de l'enfer aujourd'hui, c'est de croire en la réincarnation. C'est bien expliqué ici. Se réincarner, c'est se donner toujours une seconde chance, c'est se déresponsabiliser à cause d'un passif dont notre vie actuelle ne serait pas responsable, c'est tendre vers la disparition de soi dans un grand tout et la mort du désir. Se poserait donc le problème de ce qui persisterait réellement dans sa dimension immatérielle, après la mort.
Or, si on passe sa vie à poser des actes bons qui nous libèrent et nous rapprochent du bonheur, si on pose des actes mauvais qui nous aliènent et nous coupent du bonheur, alors on forme notre volonté et notre intelligence, on la modèle, on la fait devenir quelque chose de tout à fait unique et propre. Dans sa dimension morale que ne pourra pas avoir un robot par exemple, notre intelligence s'affine ou s'obscurcit, notre volonté se déploit ou se referme, le temps qui nous est imparti, jusqu'au moment de la mort.
Le choix positif d'aller vers le bonheur, ou le non-choix de refuser le bonheur et s'en éloigner par incapacité à le recevoir est un acte possible à cause de notre liberté.
La liberté est ce qui nous permet de dire oui, mais à condition qu'on puisse aussi dire non. La liberté parfaite consiste à toujours dire oui à ce qui nous mène au bonheur authentique.
L'enfer, c'est se couper de ce bonheur. Etre enferré dans une incapacité d'aller vers notre bonheur.
Ici-bas, on voit déjà des damnés qui disposent heureusement d'encore un peu de temps pour se tourner vers le bonheur et se sauver.
Il y a ces êtres prisonniers de leurs ventres qui ne vivent que comme esclaves de la nourriture. Ce mauvais maître leur ruine la santé pour les gloutons obèses comme pour les anorexiques maigrichons, ou les emprisonnent pour ces mesureurs de calories à tout crin...
Il y a des êtres prisonniers du sexe qui ne voit l'autre qu'à travers le sexe, perdent leur temps et leur énergie en masturbation, pornographie, dragues inutiles et romances d'un soir...
Il y a ces êtres prisonniers de la tristesse de ne pas être ou de ne pas avoir, qui jalousent le bien des autres et envient ce qu'ils sont. Leur coeur est empli d'amertume et leur langue salit tous ceux qu'ils cotoient...
Il y a ces êtres prisonniers de leur vengeance, qui veulent eux-mêmes se faire le glaive de la justice, quitte à marcher sur cette justice pour aller plus loin, à travers une passion bouillonnante comme à travers le calcul froid et méthodique. Qu'ils s'emportent pour de mauvaises raisons ou au-delà du raisonnable, ils ne savent pas s'arrêter tant qu'ils n'ont pas anéantit tout ce qu'ils pouvaient, in fine eux-mêmes.
Il y a ces êtres prisonniers de l'argent, qui ne vivent que par lui et pour lui. Mauvais maître, il ronge l'âme d'inquiétude et plonge dans le désespoir lorsqu'il se retire. Il éloigne des proches et isole dans une peur panique du lendemain.
Il y a ces êtres prisonniers d'une autre tristesse, celle de ne pas agir. Les prisonniers de l'immobilisme. Le temps passe, le devoir appelle, ils restent dans leur néant, dans la procrastination, dans l'inaction. L'être est fait pour vivre, agir, faire, ils se meurent lentement, repoussent, s'occupent.
Il y a ces êtres prisonniers de leur égo. Indépendants refusant les autres ou de devoir quoique ce soit à qui que ce soit, égoïstes rapportant tout à eux et ne vivant que par et pour eux-mêmes... même combat du toujours moi.
Ces êtres, disais-je, s'ils sont trop prisonniers et malheureux en posant régulièrement et de plus en plus des actes qu'ils les enferment en eux-mêmes, meurent comme ils ont vécu.
Seuls.
Tristes.
Esclaves.
L'intelligence noircie d'avoir passé sa vie orienté vers autre chose que le bonheur véritable, la volonté paralysée de ne pouvoir que choisir des biens qui éloignent du bonheur authentique, ne peuvent pas accéder à un bonheur qu'ils ont refusé tout le temps de leur vie.
Le salut qui leur serait offert pourra être refusé et elles s'enfermeront en elles-mêmes. N'ayant pu s'ouvrir aux autres, elles se ferment à jamais.
L'enfer est le lieu, l'état où il n'y a pas de bonheur.
Il y a des enfers sur terre: on a le temps de s'en sortir, ils sont partiels, ils ne durent qu'un temps.
Il y a un enfer sans fin après la terre: prenons le temps de se préparer pour ne jamais y entrer.

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